« Il faut arrêter de croire que si on creuse, cela n'a pas
d'influence » |
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Les sous-sols du Vieux-Lille
seraient en danger. C'est en tout cas l'hypothèse que formulent les défenseurs du
patrimoine lillois. En cause, la présence d'un parking souterrain en plein milieu du
quartier, avenue du Peuple-belge. La construction de ce parking d'environ 20 mètres de
profondeur aurait en effet déstabilisé l'équilibre du sous-sol environnant.
Le parking
construit il y a sept ans avenue du Peuple-belge menace les fondations du
Vieux-Lille ! Comment ? La réponse figure dans le dernier bulletin édité par
l'association Renaissance du Lille ancien (octobre 2000). Robert Biermant, vice-président
de la Fédération Nord Nature, y explique comment les constructions souterraines
modifient l'état naturel de la circulation des eaux en sous-sol.
Selon
lui, le niveau de la nappe est artificiellement modifié, et celle-ci peut alors
présenter des hauteurs différentes : « Là où l'eau ne remplit plus l'espace
au-dessus de la nappe, le vide s'installe, le sous-sol s'assèche... et des fondations
anciennes, jusqu'à présent immergées, se trouvent découvertes, hors de l'eau... en
milieu humide ou asséché ! »
Les
immeubles du Vieux-Lille ont souvent été construits sur pilotis. Les pieux en
chêne qui supportent ces bâtiments sont immergés, l'eau de la nappe assurant la
conservation du bois. Mais si le niveau de l'eau baisse, le bois est exposé à l'air et
aux gaz : il peut alors s'altérer et pourrir, « avec pour conséquence des
risques majeurs pour la solidité et la stabilité de la construction ! »
Hypothèse catastrophiste
Cette
hypothèse quasi-catastrophiste est défendue par Didier Joseph-François, le président
de Renaissance du Lille ancien : « On fait n'importe quoi en sous-sol,
affirme-t-il, il n'y a pas eu d'étude pour comprendre l'évolution des sous-sols, les
implications sur la nappe phréatique. Plus on creuse et plus on bétonne, plus ça
s'écroule alentour. On a des parties qui ont de l'eau et d'autres qui n'en ont
plus ». Et M. Joseph-François de rappeler l'effondrement d'un immeuble en
construction rue Nationale... entre deux parkings souterrains ! « Il faut
arrêter de croire que si on creuse, cela n'a pas d'influence » conclut-il en
s'interrogeant sur l'insouciance de la municipalité dans ce domaine.
Mais
les défenseurs du patrimoine lillois ne font pas l'unanimité dans ce dossier.
Jean-Jacques Lefèvre travaille aux services techniques de la ville de Lille. Il réfute
en bloc ces accusations. Pour lui, s'il y a un problème, c'est celui des remontées de
nappe à un endroit où le sous-sol est déjà très humide (c'est l'ancien cours de la
Deûle), et où la nappe phréatique est peu profonde : « Lille est une ville
marécageuse, construite sur l'eau depuis mille ans ». Et la forte pluviométrie est
selon lui la seule explication à ces remontées, qui peuvent éventuellement se traduire
par des inondations ponctuelles.

L'ancien cours de la
Deûle au début du siècle,
devant le Palais de Justice.
C'est l'emplacement actuel du parking
de l'avenue du Peuple-belge.
(lille1900.com)
Un argument confirmé par Catherine Monnet, l'archéologue qui a
dirigé les fouilles menées au moment de la construction du parking : « Ce
n'est pas un seul parking qui va causer ces problèmes. La remontée de nappe est due non
pas à un parking mais à toutes les constructions souterraines faites à Lille depuis les
années 60. Et les inondations ne sont pas la conséquence de remontées de nappe, mais de
phénomènes qui se produisent en surface ». Selon elle, « il n'existe pas de
risque d'assèchement », bien au contraire.
Robert Biermant assure qu'il va faire part de ses
réflexions à la Communauté urbaine. Mais de leur côté, les services administratifs se
veulent rassurants. Et s'amusent de l'agitation de ces militants associatifs sympathiques
et jusqu'au-boutistes : « Ils vont souvent un peu loin dans leurs
revendications mais c'est bien... il faut qu'ils continuent ! »
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