Peurs
et rumeurs Laurent Pirot et Brunissende Roze des Ordons |
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Les caves des HLM ont mauvaise réputation. Les rumeurs vont bon train sur ce qui pourrait se passer dans les sous-sols des quartiers difficiles. Moulins, Lille-Sud, Wazemmes, Faubourg de Béthune, et si tout n'était que fantasme ? Depuis qu'elle a été rénovée, cette barre HLM du quartier de Belfort n'a plus de cave. Ou plutôt, on en a interdit l'accès, et elle reste depuis plusieurs années à l'abandon. Le concierge de l'immeuble nous en a pourtant ouvert les portes. Dans la partie qui était commune à tous les locataires, se côtoient carcasses de vélos, restes de détritus et cadavres de chats. Les vide-ordures ont été supprimés, mais pas l'odeur des poubelles. Plus loin, là où chacun disposait d'un petit local, il ne reste plus que les escaliers condamnés et les tableaux électriques arrachés...
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Seul le gardien peut pénétrer dans ce qu'étaient les caves, et à voir le spectacle, il ne descend pas souvent déranger les rats qui y ont élu domicile. De quoi faire peur. Réunions suspectesDifficile de croire qu'on ait pu un jour prendre plaisir à s'y réunir, que des jeunes aient squatté les lieux. Et pourtant la plupart du temps dans les HLM de Lille c'est par peur des regroupements louches qu'on a interdit l'accès des sous-sols. Drogue, recel, bandes de jeunes, élevages de pitbull, voire crimes, les rumeurs les plus folles courent sur ce qui peut se passer dans les caves des logements collectifs. Les poubelles qui y brûlent parfois ne font que renforcer les fantasmes. Les habitants ne se sentent pas en sécurité et n'y mettent plus les pieds. Portes désormais muréesLe plus souvent les caves finissent condamnées. Dans le parc de la société HLM SLE, il ne reste plus que deux immeubles avec des caves utilisables. « L'insécurité des caves fait qu'aujourd'hui on préfère utiliser les sous-sols de logements neufs pour en faire des places de parking, très sécurisés » explique Nicolas Lonza, responsable lillois de la société. Mais portes murées ne veut pas dire accès impossible et certains jeunes réussissent quand même parfois à se faufiler. Mythes et réalitéQui n'a jamais eu peur de la minuterie qui s'éteint alors que les murs sont humides et les araignées nombreuses ? Et pourtant il ne se passe rien ou presque. Dans les commissariats de quartier on assure invariablement qu'aucune activité délictueuse n'a particulièrement lieu dans les caves. Habitants et éducateurs, nul n'a entendu parler d'élevage de pitbull ou de scène de viol, à part, bien sûr, dans les films. « On ne peut pas exclure qu'il y ait parfois des squatts et quelques trucs volés qui traînent. Ou même quelqu'un qui veut tirer un coup et qui n'a pas d'autre endroit où aller », confie Aïssa Essalhi, médiateur de quartier au sein de l'association Interproximité. Des cas isolésIl faut interroger les brigades spécialisées pour trouver la trace d'une affaire de drogue, l'année dernière. Un kilogramme d'héroïne, dans les caves du Faubourg de Béthune, l'affaire a fait du bruit. Pourtant à la brigade d'investigation et de recherche de Lille chargée de l'enquête, on assure que ce cas est isolé. Des histoires de drogue, les policiers en traitent au quotidien, mais dans les caves ils n'en ont pas souvenir. Pourtant de telles histoires continuent d'alimenter la rumeur et les peurs les plus folles. |
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Lille - mars 2001