L'immense réseau d'eau potable qui existe sous nos
pieds n'échappe ni à l'usure, ni aux accidents. Résultat : de nouvelles fuites s'y
créent sans cesse, qu'il faut impitoyablement déceler et réduire.
4 700 kilomètres, c'est la distance de Lille à
l'Oural ou Dakar ; c'est aussi la longueur du réseau souterrain qui alimente
l'agglomération lilloise en eau potable. Un enchevêtrement de canalisations
interminables qu'il faut sans cesse garder à l'il, sous peine de voir fléchir le
rendement du réseau.
Car
malgré tous les efforts du concessionnaire, celui-ci plafonne à 80 %. « Nous
avons environ 20 % de pertes, explique Bernard Durot, responsable de la maintenance
du réseau à la Société des eaux du Nord (SEN). Plusieurs causes se cumulent :
cela va de l'eau mise à disposition des pompiers par le biais des 9 000 poteaux
d'incendie jusqu'aux vols. Et il y a les fuites... »
Quinze mille fuites par
an !
L'ennemi
est désigné. En moyenne, on dénombre 15 000 fuites par an sur l'ensemble du
réseau, soit une nouvelle presque toutes les demi-heures ! Autant dire que
l'étanchéité absolue des canalisations n'est qu'une chimère.
Toutefois,
la SEN se bat pour que le réseau qu'elle gère ressemble le moins possible au tonneau des
Danaïdes. Avec pour arme maîtresse une technique surprenante : la corrélation
acoustique.
De
quoi s'agit-il ? Imaginez une fuite sur un tuyau. Même infime, l'épanchement de
l'eau produit une vibration à la surface de la canalisation. Le signal du salut pour les
cinq employés qui traquent en permanence les pertes d'eau, soit par des sondages
systématiques, soit en intervenant lorsqu'une « zone fuyarde » a été
détectée au centre de télécontrôle. Dans ce centre, 4 000 informations
permettant de connaître l'état de l'ensemble du réseau sont analysées en
permanence.
Recours au son
Ces
chasseurs de fuites interviennent directement sur les canalisations, en général
enterrées à un mètre de profondeur. Ils déposent deux capteurs électroniques
équipés d'un émetteur radio à deux points différents du réseau. Si une variation de
volume sonore est enregistrée entre ces deux points, dans la plupart des cas, c'est qu'il
y a fuite.
Encore
faut-il trouver à quel endroit précis elle se situe. C'est là qu'intervient
l'informatique. Le spécialiste qui se trouve sur le terrain a dans sa camionnette un
ordinateur embarqué, relié aux capteurs par un récepteur radio. Il saisit l'ensemble
des paramètres caractérisant le bruit enregistré et la canalisation concernée (âge,
matière...) À l'aide d'un modèle mathématique, l'ordinateur calcule avec précision
l'endroit exact de la fuite.
L'un des cinquante plombiers employés par la SEN peut
alors intervenir. Quant à l'information, elle remonte au centre de télécontrôle qui
l'enregistre afin d'établir les programmes de renouvellement des conduits. Une véritable
bataille de l'information !
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eaux de Lille : un cocktail savamment dosé"
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